Nationaliste Social et Ethniciste

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Les Gaules vers 400

La France n'a pas naturellement succédé à la Gaule, car il n'y a pas de fatalité en histoire et d'autres combinaisons territoriales auraient pu voir le jour. En France, l'Etat a précédé la nation, il a construit le cadre territorial dans lequel s'est forgé l'unité, l'identité et la conscience du peuple français. Les mutations qui permettront la lente émergence du royaume de France au Moyen Âge commencent au V° siècle de notre ère. Mais auparavant, il convient d'évoquer l'héritage gallo-romain qui a durablement marqué le (futur) territoire français.

 

En l'an 400 après Jésus-Christ, il y a quatre siècles et demi que les Gaules font partie de l'immense empire romain. Cette intégration s'est accompagnée d'une progressive romanisation des populations gauloises et des paysages.

 

La population, son origine, ses effectifs

La majeure partie des Gallo-romains descend des peuplades celtiques, souvent elles-mêmes mêlées à des populations présentes dès le néolithique, que César a soumises lors de la Guerre des Gaules au I° siècle avant notre ère. Au sud-est, dans l'actuelle Provence, les Celtes se sont mélangés aux Ligures. Au sud-ouest, les Aquitains se rapprochent peut-être des Ibères, population autochtone de l'Espagne, elle aussi celtisée (les Celtibères). A l'est, dans toutes les régions voisines du Rhin, les Celtes se sont mêlés aux Germains dès avant la venue des Romains. Ce sont ces derniers qui ont transformé le grand fleuve en une frontière, un limes séparant les Gaules, désormais rattachées au "monde civilisé", de la Germanie "barbare". A ce vieux fond de population d'origine celte ou plus ou moins celtisé, s'ajoutent dès une haute époque des éléments venus de loin. Les Grecs ont en effet colonisé le littoral sud-est: en 600 av. J.-C., des hommes originaires de Phocée en Asie Mineure fondent Marseille (Massilia). Suivent Nice (Nikè), Antibes (Antipolis), Agde (Agathè). Ce sont sans doute ces Grecs qui ont introduit la ville en Gaule. L'apport le plus important est sans conteste latin: les Romains, à partir de 121 avant notre ère, ont conquis et progressivement romanisé la côte méditerranéenne des Gaules (actuelles régions Languedoc-Roussillon et Provence-Alpes-Côtes-d'Azur). En revanche, après les campagnes de César, peu d'Italiens sont venus s'installer dans les nouvelles provinces. Durant la période impériale, des communautés originaires d'autres parties de l'empire (et qui, par conséquent, ne sont pas "étrangères") s'installent: des Grecs encore, mais qu'il faut comprendre comme "Orientaux parlant le grec" (ils peuvent être Anatoliens voire Syriens); les premiers chrétiens de Gaule se recrutent parmi eux. Des Juifs se fixent également en Gaule, après la destruction du temple de Jérusalem en 70 ap. J.-C.

 

Mais à partir de la fin du III° siècle, d'autres populations s'implantent en Gaule. Ou plutôt sont implantées. Celles-là viennent de l'extérieur de l'empire: ce sont des Barbares, germaniques ou sarmates. Certaines de leurs tribus ont occasionné d'importants dégâts, surtout à l'est des Gaules. Vaincus, des groupes entiers sont installés sur les terres ravagés et dépeuplés afin de les cultiver et de fournir des recrues à l'armée: ce sont les lètes germaniques. Ainsi les Chattuarii, une peuplade rhénane, battus en 360 par l'empereur Julien qui en installe certains près de Langres. Souvent d'origine franque ou alémanique, les lètes sont également nombreux autour d'Amiens, Beauvais, Cambrai et Troyes. Dans ces contrées, ils représentent peut-être 15 à 20 % de la population, ce qui est important. Et ils sont sans doute majoritaires dans certains districts (pagi). Plus au nord, dans l'actuelle Belgique, des tribus s'installent avec leurs chefs et signent des traités avec les Romains: ce sont des fédérés (du latin foedus, "traité"). En revanche, on ne rencontre presque pas de lètes au sud de la Loire. Pour l'ensemble des Gaules, on peut estimer leur proportion à 5 ou 7 % de la population totale A ces lètes s'ajoutent une masse d'esclaves originaires de partout, dans et hors de l'empire. Des militaires de différentes provenances se côtoient dans les cantonnements: Orientaux, Sarmates du nord du Danube,... Un de ces groupes mérite l'attention: ce sont les Bretons, nombreux en Gaule, et qu'on ne rencontre pas qu'en Armorique. Citoyens romains, ils ne sont d'ailleurs pas considérés comme des étrangers. Quel est l'effectif total de la population des Gaules (plus vastes que la France actuelle) vers 400? Les estimations vont de 7 à 12 millions d'habitants.

 

La romanisation

Malgré le peu d'implantations véritablement romaines en Gaule, les Gallo-romains de 400 se sentent pleinement romains. Dès le règne de Claude (41-54), des aristocrates gaulois intègrent le Sénat. En 212, l'empereur Caracalla donne la citoyenneté romaine à tous les hommes libres de l'empire. Dès lors, les Gaulois sont romains. D'ailleurs, ils servent depuis longtemps dans les légions. Leurs vins sont (déjà) réputés! Peu à peu, les noms à consonance celte sont abandonnés au profit de noms à consonance latine. Le latin s'impose partout, même dans les campagnes, sous une forme abâtardie et mêlée de termes celtes. Les valeurs romaines sont acceptées: on bâtit des villes, de somptueux palais, on va aux thermes, on lit Virgile et Tite-Live, lorsque l'on est un riche aristocrate, cela s'entend. Certains Gallo-romains tiennent même le haut du pavé: le Bordelais Ausone, poète et rhéteur, proche de l'empereur Gratien (375-383) assure à sa famille et à lui-même de lucratives fonctions dans l'administration impériale.

 

Les structures administratives et militaires

Les provinces du Haut Empire ont été divisées à partir de Dioclétien (284-305). En voici la liste: cliquer ici. L'administration est basée sur la cité, qu'il faut entendre au sens antique: une ville-centre et le territoire (assez vaste parfois) qui l'entoure. A titre d'exemple, la cité de Tours couvre l'essentiel de l'actuel département d'Indre-et-Loire; la cité de Bourges s'étend sur plus de deux départements; au contraire dans le sud-est, quatre ou cinq cités se partagent un département actuel. Ces cités sont autonomes et fières de leur identité. Elles sont dirigées par des assemblées de curiales, sortes de conseillers municipaux à vie et héréditaires, qui sont les citoyens les plus riches, car cet honneur a un coût... un peu trop élevé pour certains qui cherchent à quitter leur fonction malgré les interdictions impériales. Des magistrats (édiles, duumvirs, curateurs) sont élus pour un an et s'occupent de l'urbanisme, des bâtiments publics, des finances, de la surveillance des marchés et de la perception des impôts. Puisque, depuis 392-394, l'empire est chrétien, les sacerdoces païens sont abolis. Certaines cités sont encore prospères comme Lyon, l'antique capitale des Gaules, ou Arles. D'autres connaissent un déclin relatif. Mais l'attachement à la cité demeure. Beaucoup de chefs-lieux de cités gallo-romaines sont promis à un avenir administratif durable: 70 % de ces chefs-lieux ont encore une fonction de ce type aujourd'hui; 44 % accueillent une préfecture et 26 % une sous-préfecture; 52 % des préfectures de France métropolitaines sont d'anciens chefs-lieux de cités gallo-romaines et la proportion monte à 80 % pour les préfectures de région. Et 25 % de ces dernières étaient déjà métropole (cité-capitale de province) en 400... A la tête de la province, le gouverneur nommé par l'empereur rend la justice et lève les impôts, tout en surveillant les finances des cités de sa juridiction. Les provinces gauloises sont regroupées en deux diocèses: un pour la Gaule du nord, un autre pour la Gaule du sud, dit diocèse de Viennoise ou des Sept Provinces. Un vicaire supervise les provinces de chaque diocèse, et dépend du préfet du prétoire des Gaules, très grand personnage qui a l'autorité civile sur les Gaules, l'Espagne et la Bretagne. Au point de vue militaire, la situation officielle, telle qu'elle est énoncée dans la Notice des Dignités, est brillante: près de 60 unités sont citées, d'infanterie comme de cavalerie. Même si l'on considère qu'une unité n'excède pas 500 hommes, on arrive tout de même à un total (minimal) de 25 000 fantassins et 5 000 cavaliers, auxquels il faut ajouter les détachements létiques et les unités du limes! Impressionnant, d'autant que le "maître de la cavalerie pour les Gaules" centralise le commandement. Dans les faits, des prélèvements sont très régulièrement effectués, notamment autour de 400 pour défendre le nord de l'Italie de plus en plus menacé. En 406, il n'y aura guère que 5 500 soldats à la garde du Rhin, aidés des lètes et fédérés, pour résister aux Vandales, Suèves et Alains...

 

La religion: paganisme et christianisme

Malgré le zèle évangélisateur de certains évêques, comme Martin de Tours, le paganisme n'est pas éradiqué en Gaule. Généralement, un évêché est implanté dans chaque chef-lieu de cité, et un archevêque (équivalent du métropolite orthodoxe) dans chaque métropole (capitale de province) avec primauté sur les autres évêques de la province. C'est pourquoi, jusqu'à la Révolution française, la carte ecclésiastique de la France sera fortement marquée par le découpage administratif de l'empire tardif. En 400, toutes les cités ne sont point encore pourvues d'un évêque mais progressivement, au cours du V° siècle, l'Eglise améliore l'encadrement religieux du territoire.

 

Petite bibliographie:

Rouche M., Clovis, Fayard, 1996

Lequin Y. (sous la direction de), Histoire des étrangers et de l'immigration en France, Larousse, 2006

Guyotjeannin O., Atlas de l'histoire de France IX°-XV° siècle, Autrement, 2005



04/05/2009
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