Loi sur le voile intégral: vers l'échec?
Au risque de surprendre, l'islamophobe convaincu que je suis pense qu'il y a d'autres problèmes plus importants : question de l'immigration, du néo-racisme, de l'identité « immigrée » anti-française qui sont le fond du problème dont le voile n'est qu'un élément ostensible parmi d'autres, mais aussi problèmes économiques et sociaux (on n'entend plus tellement parler de la crise ni de la moralisation du capitalisme libéral, c'est étonnant), question européenne, réforme des institutions ou encore avenir de la fonction publique. Un axe politique cohérent devrait embrasser toutes ces problématiques. Mais le président est en « situation d'échec », selon l'expression consacrée. Son Grenelle de l'environnement s'avère être du pipeau (et je me dédis sur la taxe carbone…), ses accords avec l'industrie automobile idem (et PSA licencie impunément, mais ce n'est pas un site de production, vous comprenez…), la réforme du capitalisme fait rire de Wall Street à la City, je gage. L'insécurité augmente, l'immigration n'est ni choisie ni véritablement régulée, le pouvoir d'achat baisse (ou stagne), l'épargne des classes moyennes et populaires est réduite à rien ou presque avec le maintien d'un taux scandaleusement bas du Livret A. Bref, l' « omniprésident » est devenu un « sous-président », faible, régulièrement humilié, et qui tend des verges pour se faire battre en se faisant surprendre en flagrant délit de contradiction à quelques mois d'intervalles. En attendant (peut-être) une hypothétique réélection, Nicolas Sarkozy en est réduit à distribuer de l'argent aux médecins (augmentation de la consultation), aux chômeurs de longue durée en attendant les agriculteurs, les vignerons et quelques autres. « Très actif mais vite usé », ainsi pourrait-on définir M. Sarkozy. Par les temps qui court, autant lancer un sujet qui amusera la populace, qui provoquera moult débats futiles, occupera les intellectuels de service tout en détournant les citoyens de la critique acerbe que méritent le Président et sa Majorité. Ce sujet est la loi sur le voile intégral.
Le principe
Sur le principe, je l'admets, l'idée d'interdire le voile intégral est séduisante. Par hostilité envers la religion musulmane. Je me méfie de toutes les religions en général mais j'exècre l'islam plus particulièrement. Il est remarquable que ces gens-là réclament ici une liberté de culte qui est bien rare en terre d'islam. Les non-musulmans sont régulièrement victimes de persécution ou de violence dans les pays à majorité musulmane du pourtour méditerranéen, aux portes de l'Europe donc, sans parler des églises que les soldats de l'OTAN laissent brûler au Kosovo, en Europe même. Evidemment, ces faits ne font pas la Une du 20h. Mais lorsque on a vraiment envie de se renseigner, on y arrive. Je renvoie à nouveau au livre Chrétiens d'Orient. Et s'ils disparaissaient ?, sous la direction d'Antoine Sfeir.
Dans les pays d'Europe où ils sont minoritaires, les musulmans, par crispation identitaire et par refus de s'acculturer, posent problème : Grande-Bretagne, Belgique, Pays-Bas, Suisse, partout hors de France le débat fait aussi rage autour de la question de l'islam, parce que l'islam est voyant, conquérant et arrogant. Comment ne pas voir que de nombreux musulmans, avec une habileté consommée, retournent contre nous nos principes de liberté et de tolérance pour imposer des règles qui sont liberticides et intolérantes ? Ils nous intiment l'ordre de respecter leur foi, mais eux se moquent bien de violer nos usages et nos codes sociaux et culturels : en France, on mange du cochon, on ne voile pas les femmes, on ne sépare pas (ou plus) les sexes. Et cela, nombre de musulmans ne l'acceptent pas. Ils refusent de s'adapter. Alors, je pose la question : qui est irrespectueux de l'autre ? Jamais je ne considérerai ces gens comme des compatriotes, comme des « frères ». On peut bien leur donner tous les droits de la Terre, ils ne seront jamais français. Je parle là des musulmans dont la pratique est ostensible et provocante. Les personnes de tradition musulmane, incroyantes ou dont la pratique est discrète et dénuée de prosélytisme, ne me posent aucun problème et leur place dans la communauté nationale n'est pas à remettre en cause. A titre personnel, je vois le catholicisme comme un héritage, qui fait partie de ma culture. Je me signe quand j'entre dans les églises (car j'aime à les visiter), par respect pour la religion historique de la France, et pour mes aïeux dont certains furent pratiquants. Mais cela s'arrête là : je ne pratique pas, si j'ai envie de manger de la viande le Vendredi Saint, personne ne m'en empêchera et je ne jeûne pas lors du Carême. Les interdits et les prescriptions du christianisme ne me concernent pas. Je demande aux Français musulmans d'adopter ce type d'attitude, qui est celle de la majorité des Français de tradition catholique. Et si vraiment il leur est impossible de ne pas pratiquer, qu'ils aient au moins la correction de laisser les autres manger du cochon, de ne pas imposer de viande hallal et de laisser tranquille ceux qui, bien que de tradition musulmane, ne veulent pas pratiquer (car on observe parfois d'intolérables pressions sur des personnes « présumées musulmanes » parce que d'origine maghrébine par exemple, pour qu'elles pratiquent alors même qu'elles ne le souhaitent pas nécessairement).
Interdire le voile intégral fera bondir les dirigeants de l'UOIF qui sont, comme chacun sait, des républicains purs et durs, la laïcité chevillée au corps. Une laïcité dont eux seuls et Tariq Ramadan détiennent les clés d'interprétation parce que les Français natifs, qui vivent sous le régime de la laïcité depuis 1905, n'ont rien compris à ce principe qu'ils ont eux-mêmes énoncé ! On nage en plein délire : des individus, pour la plupart nés et élevés dans des pays où l'islam est religion d'Etat, se prétendent compétents pour nous expliquer à nous, pauvres ignares, ce qu'est la laïcité ! Autant demander à un libéral de faire l'apologie de la collectivisation… La simple idée de voir les chefs de l'UOIF et ce cher M. Ramadan venir sur les plateaux télé hurler leur indignation et nous expliquer que « la France n'est pas fidèle à ses valeurs », voilà qui me séduit. D'emblée, il convient de balayer certains arguments avancés par les islamophiles. D'abord, la loi stigmatiserait les musulmans. Allons donc ! Les musulmans sont de plus en plus détestés, et pont n'est besoin de loi pour que l'islamophobie gagne encore du terrain dans les prochaines années. Et Jean-Luc Mélenchon, dans un de ses bons moments, avait fait remarqué fort justement que lorsqu'une femme se voile, elle se stigmatise elle-même. Par conséquent, l'argument de la stigmatisation n'est pas pertinent. L'islamophobie est pour une bonne part attisée par les musulmans eux-mêmes, leurs provocations incessantes, leurs prétentions à obtenir des privilèges et leur propension à menacer (y compris de mort) leurs adversaires.
L'idée selon laquelle la loi serait inapplicable ne me convainc que partiellement. Je pense que la police a des affaires plus graves à régler. Mais les femmes portant le voile intégral sont soi-disant peu nombreuses. Si la police municipale reçoit la possibilité de verbaliser, avec la police nationale et la gendarmerie, l'application de la loi en sera facilitée. Evidemment ce type de verbalisation pourrait entraîner des « violences urbaines ». Mais elles auront lieu de toute façon, tout prétexte étant bon pour les voyous des cités.
Mais quel argument pertinent pour défendre une loi ?
En entendant les déclarations des dirigeants, je me demande si la loi d'interdiction pourra passer. Les arguments invoqués semblent très fragiles, et les promoteurs de la loi l'avouent même, ce qui montre d'une part leur enthousiasme débordant, d'autre part leur ardeur à trouver des éléments sérieux pour fonder une éventuelle procédure législative.
Les défenseurs de la loi parlent de « dignité », mais ce concept est difficile à manier dans le domaine juridique. Il est extrêmement subjectif. Ainsi, si un enfant hurle dans un magasin parce que ses parents refusent de lui acheter le jouet qu'il convoite, et que son père ou sa mère lui administre une ou deux fessées, certains considéreront que c'est une atteinte à la dignité. Moi pas. Il m'est arrivé, parfois, de faire une remarque (gentiment, sans volonté de blesser) à un élève sur sa petite taille (sachant qu'en général, il grandira…). Aucun élève ne l'a mal pris jusqu'à présent. Et pourtant ! N'est-ce pas une intolérable atteinte à la dignité d'autrui ? Tout est affaire de jugement personnel en ce qui concerne la dignité. De toute façon, l'argument de la dignité s'effondre dès lors qu'une seule femme porte le voile intégral par choix et non par contrainte. Or des enfoulardées volontaires pour ressembler à Belphégor, les journalistes de toutes les chaînes de télévision ne se sont pas fait faute d'en trouver (à tel point qu'ils ont presque développé l'idée que toutes les femmes qui portent le voile intégral le font de leur plein gré, ce qui est contestable).
D'autre part, légiférer sur la tenue vestimentaire est une atteinte à la liberté, reconnaissons-le. Il y a un danger à mon sens à restreindre la liberté, principe républicain chèrement acquis, même si c'est pour combattre nos ennemis. Ce procédé peut un jour se retourner contre nous, et on nous fera remarquer à juste titre que nous avons les premiers violé le principe que nous prétendions défendre. Si au contraire nous laissons leur voile intégral aux musulmanes fanatiques, les niqabs (plutôt que les burqas, rarissimes en France) se multiplieront sans doute. Les musulmans radicaux, croyant l'avoir emporté, ne manqueront pas de chercher à imposer leur tyrannie dans certains quartiers. Dès que nous aurons la preuve que ces intégristes violent la liberté, il suffira de les éliminer d'une manière ou d'une autre, en ayant le bon droit de notre côté. Et si les banlieues s'embrasent, ce qui est à prévoir, ce sera enfin l'occasion de crever l'abcès une bonne fois pour toutes en noyant dans le sang une rébellion qui sévit à l'état endémique depuis des années et dont les émeutes de 2005 n'ont été que l'épisode le plus spectaculaire.
Le seul argument qui pourrait être valable juridiquement est la question de l'identification d'une personne sur la voie publique. En effet, la loi française pourrait légitimement exiger que toute personne se déplaçant dans l'espace public soit reconnaissable, c'est-à-dire que son visage devrait être visible. Ainsi, la loi stipulerait qu'en dehors de certaines périodes festives (carnaval), les individus doivent être facilement identifiables et que par conséquent ils doivent avoir le visage découvert. L'avantage de cet argument est que l'islam n'est pas nommément cité, et donc la loi retrouve un caractère universel qu'elle perd si on s'en prend au seul voile intégral islamique. Evidemment, on n'évacue pas un éventuel problème d'application. Mais c'est la seule façon à mon avis d'éviter que la loi ne soit anticonstitutionnelle.
Si même une telle loi ne passait pas, ce qui est fort possible, on pourrait se rabattre sur la proposition du Conseil d'Etat, à savoir interdire le port du voile intégral dans les administrations et bâtiments des services publics : préfectures, trésoreries, mairies, tribunaux, où il y a de fortes chances que ces femmes se rendent rarement, mais aussi hôpitaux (question : si la femme refuse de retirer son voile, peut-on refuser de la soigner ?) et écoles (les enseignants n'ont pas à recevoir des femmes intégralement voilées ; pour ma part, je m'y refuse). Mais l'essentiel du travail est peut-être ailleurs : on ne doit pas permettre à ses femmes de voter avec un voile intégral, car si le vote est anonyme et secret, le citoyen, lui, ne saurait l'être. Dans le cas de femmes étrangères demandant la nationalité française (ces intégristes ne manquent pas de culot !), il faut rejeter ce type de demande et ajouter si nécessaire dans les règlements d'acquisition de la nationalité l' « incompatibilité du comportement de la personne avec le caractère laïque de la République ». Il faut aussi, dans la vie quotidienne, refuser tout dialogue avec ses fanatiques. Ces femmes affichent leur différence au nom de leur foi intransigeante, pourquoi les mécréants que nous sommes devraient-ils les accepter et les considérer avec respect ? Dans toutes les interviews, ces enfoulardées apparaissent évidemment tolérantes parce qu'elles se savent minoritaires et mal vues. Juste une question : si demain les islamistes arrivaient au pouvoir et entendaient imposer leurs prescriptions vestimentaires, entendrait-on ces femmes protester et prendre la défense de celles qui refusent le voile (intégral ou non) ? J'en doute. Qu'on cesse de nous prendre pour des imbéciles. La France ne sera jamais le pays de ces dangereux fanatiques. Et j'ajoute que le monde musulman est bien assez vaste, du Maroc à l'Indonésie, pour accueillir tous ceux et toutes celles qui veulent vivre selon les stricts préceptes de l'islam. Pourquoi donc venir ici nous défier ? Ou bien faut-il y voir une stratégie d'importation de l'islam dans les pays d'Europe avec le projet, à terme, d'islamiser le sous-continent ? Nos apprentis sorciers, dans ce cas, s'exposent à un sanglant échec.
Conclusion
Les dirigeants UMP ont-ils vraiment envie que cette loi voit le jour ? Pour ma part j'en doute. Observons le contexte : la droite écrasée aux élections régionales, l'insécurité qui augmente, un président affaibli et décrédibilisé. Il semblerait donc que l'UMP veuille envoyer un signal à la frange « dure » de son électorat, et peut-être aussi aux électeurs du FN. Mais tout le monde à l'UMP n'est pas d'accord. La défaite du chef charismatique a brisé la belle unité qui s'affichait depuis 2007. Les rancoeurs et les ambitions refoulées pointent leur nez. La droite commence à se décomposer : fronde des parlementaires, attaques régulières de Dominique de Villepin, opposé à cette loi qui « divise » et ne va pas dans le sens du sacro-saint « consensus ». Le consensus avec les musulmans radicaux, M. de Villepin ? Il est possible à condition que nous nous convertissions tous, ou bien que nous nous résignions à n'être que des dhimmis méprisés, des citoyens de seconde zone, ce que sont bien souvent les non-musulmans en terre d'islam aujourd'hui.
Il n'est donc pas assuré qu'une majorité vote cette loi. Et si elle est votée, il est fort possible que le Conseil Constitutionnel l'invalide. Comme d'ici là, l'actualité aura évolué et d'autres thèmes auront supplanté celui-là, qu'adviendra-t-il ? Il se pourrait fort que d'ici peu, on n'entende plus parler de cette loi, mais alors plus du tout… Avant qu'elle ne réapparaisse peut-être au moment propice, lors des élections présidentielles de 2012 par exemple. Qui sait ?
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