Qu'est-ce que le nationalisme?
Qu'est-ce que le nationalisme? Que signifie être nationaliste?
Voilà des questions tout à fait légitimes que tout citoyen égaré sur ce blog est en droit de se poser. Il règne en effet certaines confusions quant à la signification et l'usage courant des termes "nationalisme" et "nationaliste".
Le nationalisme n'est pas à proprement parler un mouvement politique, pas plus qu'il n'est une idéologie constituée. Il existe effectivement en France un "Parti nationaliste français" mais qui n'est en réalité qu'un des nombreux groupuscules d'extrême-droite. Non, le nationalisme est plutôt un état d'esprit. Il est plus fort et plus virulent que le patriotisme, simple attachement sentimental et apolitique à la patrie, la "terre des pères". Être nationaliste signifie en fait une seule chose: considérer qu'en matière politique, la nation est l'élément le plus important, celui qu'on doit défendre à tout prix. Mais le mot "nationaliste" fait peur. Alors beaucoup d'hommes politiques, pour ne pas s'attirer les foudres des philosophes à la mode et des journalistes, s'intitulent "souverainistes". Pour ma part, je considère que "souverainisme" est synonyme de "nationalisme", puisqu'il s'agit bien de défendre la souveraineté de la nation. Donc de défendre la nation, son indépendance et sa cohésion.
Le nationalisme en France est divers. En effet, comme il ne s'agit nullement d'une idéologie, le nationalisme ne préjuge pas d'autres appartenances politiques. Il est temps d'ailleurs de mettre un terme à une légende qui a la vie dure: le nationalisme n'est pas l'apanage de l'extrême-droite. Tous les nationalistes ne sont pas d'extrême-droite, et toute l'extrême-droite, mouvance très complexe, n'est pas nationaliste, loin s'en faut! Ainsi, les mouvements d'extrême-droite qui militent pour la "grande Europe aryenne" ou la "défense de la race blanche" n'ont pas grand-chose à voir avec le nationalisme authentique... à moins que l'on considère que l'Europe est une nation, ce que je récuse formellement. Je distinguerai deux grands types de nationalisme: le nationalisme libéral et le nationalisme social.
Le nationalisme libéral est, pour aller vite, le nationalisme "de droite". C'est Le Pen et le FN (qui, je le rappelle, ne représente qu'une partie de l'extrême-droite en terme de ligne idéologique bien qu'il la fédère largement au plan électoral). C'est également de Villiers. Je dis "nationalisme libéral" en référence au discours économique de ces hommes: ils sont clairement pour une économie capitaliste libérale, ils partagent une méfiance certaine de l'Etat et une haine viscérale des fonctionnaires et de la "bureaucratie pléthorique". Il faut peut-être y voir le résultat d'un anti-communisme virulent, ajouté au constat que la fonction publique ne fournit guère d'électeurs à ces mouvements politiques. Ce nationalisme est également nostalgique et regrette le bon temps de nos campagnes, nos villages, nos églises, nos paysans. Comme si la vie à cette époque (fin XIX°-début XX°) avait été exempte de problèmes, de soucis et de misère. Par conséquent, ce nationalisme est réactionnaire et anti-moderniste. C'est un nationalisme de la tradition. Je ne condamne pas en bloc cette conception des choses. Historien, je suis sensible au passé, parfois glorieux, de la France et à son patrimoine, architectural notamment. Et mes ancêtres viennent du monde rural. Mais je sais aussi que ce passé ne doit pas être idéalisé. De plus, certaines filiations historiques de ce nationalisme me gênent (je développerai ce point dans un article intitulé "Brève histoire du nationalisme en France" [1]).
Le nationalisme social a une vision plus progressiste de la nation et de la société. Ce n'est pas à proprement parler un nationalisme de gauche, car je place dans cette catégorie Dupont-Aignan et le gaullisme en général. Le gaullisme est une forme de nationalisme où l'Etat tient une place centrale. Peut-être est-ce dû à l'époque de son apparition, au temps de l'âge d'or de l'Etat-Providence. En dépit de cet aspect étatiste, le gaullisme est plutôt classé à droite. Mais il est moribond. Je ne peux que saluer le louable combat de Nicolas Dupont-Aignan mais je doute qu'il soit en mesure de peser sur l'avenir du pays. Le nationalisme social se rencontre aussi à gauche, où d'ailleurs il est assez mal vu. Chevènement est le plus important représentant de cette mouvance puisqu'il allie socialisme réformiste, nationalisme et attachement aux valeurs républicaines. D'autres personnalités ou mouvements, par une partie de leur discours, peuvent s'apparenter au nationalisme social: Mélenchon, désormais à la tête de son Parti de Gauche, d'ailleurs traité de "social-souverainiste" par un journaliste qui a trouvé là une expression intéressante; le Parti Ouvrier Indépendant, héritier du défunt Parti des Travailleurs, qui, en défendant la République contre les ingérences de l'Union européenne, tient un discours "souverainiste" de gauche. Ce que je reprocherai à ce nationalisme de gauche, c'est trop souvent d'idéaliser le progrès et de haïr la tradition, toujours vue comme rétrograde et néfaste, et d'être prisonnier d'un schéma de pensée marxiste ou marxisant. De plus, ces gens, à mon sens, font preuve d'un total aveuglement concernant l'immigration.
Ce rapide tableau ne prétend pas à l'exhaustivité. Où se situe l'auteur de ce blog? Dans la deuxième catégorie, indéniablement. Nationaliste social je me considère, car je défends les prérogatives de l'Etat, la fonction publique (dont je suis membre) et les acquis sociaux. Je suis fidèle à la République et à son projet de bâtir une société de citoyens libres, égaux, éclairés et solidaires. C'est bien pourquoi j'enseigne l'éducation civique à des collégiens (encore que mes cours ne soient guère au point...). Cependant, rien n'est jamais simple. Je ne me sens pas gaulliste et encore moins "de gauche", car la question de l'immigration me sépare à tout jamais de cette famille politique. Je comprends le clivage "gauche-droite", mais il m'est impossible de choisir un camp, pour la bonne et simple raison que les nationalistes sont minoritaires dans chacun de ces camps, parfois en voie d'extinction et souvent considérés comme des pestiférés au sein de leur famille politique. J'ajoute que la plupart sont vieillissants et sans réels héritiers (Le Pen, Chevènement) ou en phase de marginalisation (Dupont-Aignan, Mélenchon). J'ai de plus des points de désaccord importants avec la plupart. Pour moi, l'avenir du nationalisme français est en dehors de ces hommes et de ces mouvements.
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