Nationaliste Social et Ethniciste

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Colbert et son héritage

Récemment, il s'est produit des faits graves: une statue de Colbert a été vandalisée par un activiste noir, et un ancien premier ministre dont je tairai le nom a proposé de débaptiser la salle Colbert de l'Assemblée Nationale. Il est très sérieusement question de renommer les rues et établissements scolaires qui auraient le malheur de porter le nom du ministre de Louis XIV. J'ai parlé de faits graves. Vous me direz: "et l'épidémie de coronavirus? Et la crise économique qui se profile? Que pèse la réputation d'un ministre mort il y a plus de trois siècles face à la catastrophe écologique? Que vaut une statue défigurée face au malheur des humbles et des "sang-mêlé" (pour reprendre le terme employé par le nouveau Garde des sceaux)?". L'épidémie passera, la crise économique aussi. Mais si on laisse ternir les grands noms de l'histoire nationale (parce qu'après Colbert, il y en aura d'autres), la France finira par en mourir. Et moi, je veux que la France vive. Derrière Colbert, c'est toute l'histoire, toute l'identité de notre nation blanche et catholique qui est attaquée, avec comme objectif d'empêcher toute remise en cause de la substitution ethnique en cours dans notre pays. C'est pourquoi il est nécessaire de reprendre le dossier Colbert.

 

Origine et ascension de Colbert (1619-1661)

Jean-Baptiste Colbert est un homme de race blanche (1) né le 29 août 1619 à Reims. C'est un Français de souche (2) dont la famille est connue à Reims depuis la fin du Moyen Âge. Ses ancêtres sont des bourgeois qui ont su s'enrichir au cours des siècles. Ils sont maçons à la fin du Moyen Âge (sans doute faut-il entendre par là entrepreneurs en construction, et non simples ouvriers), puis marchands à la Renaissance, enfin officiers du roi et financiers au XVII° siècle. L'essor des Colbert est parallèle à l'affirmation du pouvoir royal. Ces bourgeois rémois sont dans une dynamique conquérante. Leurs affaires s'étendent à Troyes et à Paris. Par mariage, par l'achat d'offices et de terres anoblissantes, ils s'efforcent de s'agréger à la petite noblesse. Le père de Jean-Baptiste, Nicolas Colbert (1590-1661) est donc un notable rémois, marchand et conseiller de la ville. Mais Reims devient peut-être trop étroite pour ses ambitions et il s'installe à Paris où il achète divers offices, dont celui de "Conseiller du Roi" en 1652. Néanmoins, il semble que la période troublée de la Fronde n'ait pas fait ses affaires. Jean-Baptiste est le deuxième enfant et l'aîné des quatre fils de Nicolas. Il suit d'abord l'enseignement du collège jésuite de Reims. Puis son père l'envoie travailler chez un banquier lyonnais. Jean-Baptiste effectue également un stage chez un procureur du Châtelet qui le sensibilise aux questions d'ordre public et de justice, avant d'entrer au service du secrétaire d'Etat à la guerre Michel Le Tellier (père du fameux Louvois qui lui succédera dans cette fonction) en 1645. Colbert se rapproche ainsi du pouvoir et finit par entrer au service du cardinal Mazarin en 1651, comme intendant de l'immense fortune amassée par le tout-puissant ministre du jeune Louis XIV. Entretemps, Colbert a épousé la fille d'un Conseiller du roi, qui lui apporte 100 000 livres de dot. Mazarin saura apprécier à leur juste valeur les qualités de Colbert, travailleur, efficace, loyal. Il faut cependant noter que Colbert ne doit pas sa réussite à ses seuls talents, il est redevable de la constante et patiente stratégie d'ascension de sa famille. Il a bénéficié du soutien de sa parenté, notamment son oncle maternel Henri Pussort et son cousin homonyme du côté paternel, Jean-Baptiste Colbert dit de Saint-Pouange pour ne pas les confondre. Avant de mourir, Mazarin recommande Colbert au jeune Louis XIV qui décide de l'adjoindre à Nicolas Fouquet, le Surintendant des Finances. 

 

Le "Grand Colbert" (1661-1683)

Le 9 mars 1661 mourut le cardinal Mazarin. Le lendemain, Louis XIV réunit ses ministres et leur annonça son intention de gouverner personnellement son royaume, décision que l'on a résumé par la formule lapidaire "l'Etat, c'est moi". Le ministre le plus puissant est alors Nicolas Fouquet, Surintendant des Finances, qui a peuplé l'administration de ses créatures et qui s'est considérablement enrichi jusqu'à se faire bâtir le somptueux château de Vaux-le-Vicomte. Louis XIV n'aime pas Fouquet, moins parce qu'il a profité de sa position pour vivre dans l'opulence (ce que font tous les ministres de l'époque, à commencer par Mazarin) que parce qu'il représente le "parti dévot", la faction ultracatholique des élites françaises, que Molière ne s'est pas privé de ridiculiser dans sa célèbre pièce du Tartuffe. La fameuse fête que Fouquet offre au roi à Vaux-le-Vicomte n'est qu'un prétexte, car Louis XIV a déjà décidé de se débarrasser du Surintendant. Colbert, qui aspire sans doute à récupérer les attributions de Fouquet, n'a pas ménagé ses efforts pour entamer le crédit du Surintendant auprès du roi. Est-ce à dire que Colbert a provoqué la chute de Fouquet? Sans doute pas, mais cette chute fait ses affaires, et il l'a encouragée. Il en sera aussi l'un des principaux bénéficiaires. Fouquet est arrêté en septembre 1661 et son poste est supprimé. Mais Colbert devient de facto le responsable des finances du royaume. Cette nomination de Colbert et d'autres ministres issus de la bourgeoisie est à replacer dans le cadre de la politique de Louis XIV qui vise à écarter des responsabilités les princes du sang (on se souvient que Condé fut frondeur) et les grands noms de l'aristocratie. L'autre aspect de cette politique sera bien évidemment la domestication de la noblesse à Versailles.

 

Bien qu'il soit aux affaires dès 1661, ce n'est qu'en 1665 que Colbert reçoit le titre de Contrôleur général des Finances. A ce poste, il intervient dans de très nombreux domaines, à savoir les travaux publics (il a d'ailleurs reçu la charge de Surintendant des Bâtiments en 1664), l'industrie, le commerce, la police, l'administration. Il nomme la plupart des Intendants qui sont de fait sous sa dépendance. A partir de ce moment, il va cumuler de nombreuses responsabilités, preuve de la grande confiance que le roi lui accorde: en 1669, il est nommé Secrétaire d'Etat à la Maison du roi, de Paris, du Clergé et de la Marine, une fonction qu'il transmettra à son fils; Colbert a la haute main sur la "politique culturelle" du roi puisqu'il supervise les Académies de peinture et de sculpture, d'architecture, ainsi que l'Académie de France à Rome, l'Imprimerie royale et l'Académie des sciences. Cela en fait un véritable "ministre de l'image" de Louis XIV, ou pour le dire autrement le responsable de la propagande du régime. On le sait, Louis XIV tenait à mettre les Sciences et les Arts au service de sa gloire, et Colbert a beaucoup travaillé en ce sens. Non sans désaccord: Colbert, peu enthousiaste devant le projet du château de Versailles, aurait préféré un réaménagement du Louvre. 

 

Mais le nom de Colbert reste surtout associé à une politique économique à laquelle il a donné son nom, le colbertisme. C'est en fait la déclinaison française d'une théorie à la mode à l'époque, le mercantilisme. Pour faire simple, cette théorie postule que la richesse d'un pays se mesure à sa capacité à attirer et à conserver d'importantes quantités de métaux précieux. Comme ces derniers sont censés, du moins en Europe, avoir atteint une masse totale stable, il faut pour enrichir le pays essayer de capter le métal précieux présent dans les autres états. Pour cela, Colbert fixe des objectifs simples: augmenter les exportations et limiter les importations, bref avoir une balance commerciale la plus excédentaire possible. Le but est d'enrichir le roi et l'Etat et de financer ainsi la politique de puissance de Louis XIV, y compris les guerres. D'ailleurs, Colbert conçoit sa politique comme un prolongement des conflits qui opposent la France aux autres grandes puissances puisqu'il écrit vouloir faire "une guerre d'argent contre tous les Etats d'Europe". Pour atteindre son but, Colbert utilise plusieurs leviers. D'abord, il encourage l'industrie en favorisant la création de manufactures royales comme les Gobelins dans le secteur du meuble et de la tapisserie. Il n'hésite pas à faire venir des spécialistes étrangers comme le marchand hollandais Van Robais qui installe une manufacture de draps fins à Abbeville. Colbert déploie également tout un arsenal de réglementation visant à augmenter la qualité et la productivité. Cette industrie n'a cependant rien à voir avec celle du XIX° siècle, car il s'agit essentiellement de produire des biens de luxe à destination d'une élite fortunée et de la Cour. Ensuite, Colbert favorise le commerce, en fondant une série de compagnies commerciales: Compagnies des Indes Occidentales, des Indes Orientales (en 1664 pour les deux), du Nord (1669), du Sénégal avec monopole de la traite négrière (1673). Le Contrôleur général ne néglige pas non plus les infrastructures, comme les routes qu'il améliore. Colbert mène enfin une politique protectionniste, déclenchant notamment une guerre des tarifs avec les Provinces-Unies (nom des Pays-Bas à l'époque moderne).

 

Afin d'augmenter les moyens financiers du roi, encourager le développement du commerce et de l'industrie ne suffit pas, il faut aussi améliorer la politique fiscale et assainir les finances royales. De ce point de vue, Fouquet laisse une situation peu enviable: sa politique d'emprunt conduit la monarchie à dépenser les recettes des années suivantes alors même que l'année en cours n'est pas terminée. Colbert veut baisser la taille qui est le principal impôt direct et qui touche les non-privilégiés (le tiers-état), notamment les marchands et les artisans dont le Contrôleur général veut favoriser l'activité, et augmenter les impôts indirects qui frappent la circulation et la consommation des biens, souvent de luxe, et qui sont payés par les privilégiés (noblesse et clergé) et les plus riches membres du tiers-état. Pour rendre plus efficace la perception de l'impôt, Colbert crée en 1681 la Ferme générale, qui regroupe des financiers chargés d'avancer à l'Etat le montant d'un certain nombre d'impôts (dont la fameuse gabelle, taxe sur le sel fort impopulaire) et qui se remboursent ensuite en prélevant lesdits impôts, sans oublier de faire du bénéfice au passage. Colbert cherche également à réduire les dépenses. Il lance une grande enquête sur la noblesse afin de démasquer les usurpateurs qui, en prétendant appartenir au second ordre, se soustraient au paiement de la taille par exemple. Il limite le nombre d'offices, en procédant à des rachats et des suppressions: en effet, vénalité des charges oblige, la vente d'un office rapporte de l'argent au trésor royal mais, à terme, il faut verser aux titulaires les pensions auxquelles ils ont droit, et l'opération se révèle au final onéreuse.

 

En dehors de la politique économique à laquelle Colbert donne son nom, on peut également évoquer les grandes ordonnances: celle de 1667 sur la procédure civile cherche à simplifier et uniformiser les prodédures, dans un royaume de France où la diversité régionale héritée du Moyen Âge est encore bien vivace. Très importante, l'ordonnance des Eaux et Forêts de 1669 a pour objectif de rendre au roi ses droits sur le domaine forestier, que Colbert s'efforce de protéger et de préserver. Le souci du ministre n'est pas à proprement parler "environnemental", mais il semble bien que cette législation ait en partie arrêté la dégradation du couvert forestier français. Les écologistes devraient bénir Colbert... Citons encore l'ordonnance de la marine de 1681. En tant que secrétaire d'Etat à la marine, Colbert est très sensible aux questions maritimes, et nous avons vu qu'il avait tenté de développer le grand commerce avec les autres continents. Cette ordonnance réglemente la gestion des ports et les métiers de la mer. En outre, soucieux de faire de la France une grande puissance navale, le Contrôleur général cherche à développer les infrastructures portuaires en lançant les chantiers de Sète (écrit Cette à l'époque) et de Rochefort à partir de 1666.

 

Bilan du ministère de Colbert

Comme on le voit, Colbert a fait feu de tout bois pour pousser Louis XIV à réformer, réglementer, rationaliser, uniformiser. Pour quels résultats? Le bilan est loin d'être négligeable. Dans les années 1660, Colbert réussit à doubler les revenus du roi, et pendant près de dix ans, le budget est à l'équilibre. Par les grandes enquêtes qu'il lance et qu'il supervise, Colbert offre à la monarchie une meilleure connaissance du territoire et de ses ressources. L'essor du commerce et de l'industrie est indéniable. Il est clair cependant que Colbert n'a sans doute pas atteint les objectifs qu'il s'était fixé. Les guerres de Louis XIV vont rapidement mener à des dérapages budgétaires et au retour des expédients financiers. L'enquête sur la noblesse est un demi-échec, puisqu'une seconde enquête est lancée dans les années 1690. Colbert n'a pas non plus réussi à attirer autant de capitaux que souhaités dans les activités commerciales. La Compagnie des Indes Occidentales cesse ses activités en 1672. Les négociants français aspirent toujours à acheter des offices anoblissants et à entrer dans le second ordre, celui des oisifs privilégiés. La France reste un pays rural, de paysans, dont "labourage et pâturage sont les mamelles" pour reprendre les mots de Sully, ministre d'Henri IV. Malgré le développement de sa marine, le royaume peine à devenir une grande puissance navale capable de rivaliser avec l'Angleterre et les Provinces-Unies. Il n'en demeure pas moins que Colbert a apporté sa pierre à l'édifice de la construction nationale. Avec Louis XIV, il a oeuvré efficacement pour poursuivre le processus de centralisation et d'uniformisation entamé depuis Philippe Auguste. Son rôle dans l'élaboration d'une culture littéraire et artistique "nationale" est important. Bien sûr, cette culture est à l'époque réservée à une élite mais elle va progressivement se diffuser dans l'ensemble de la population aux siècles suivants. Colbert reste sans doute le plus grand ministre du Roi-soleil. Et être le plus grand ministre du plus grand roi de France, ce n'est pas rien.

 

Le clan Colbert

On l'a dit, la réussite de Jean-Baptiste Colbert est le résultat du mariage réussi du mérite et d'une patiente stratégie familiale d'ascension sociale. Une fois parvenu au sommet, Colbert n'a pas oublié les liens du sang et a assuré la promotion des siens. Beaucoup de Colbert font une belle carrière au service du roi. Charles Colbert de Croissy, frère cadet de Jean-Baptiste, devient ainsi Secrétaire d'Etat aux Affaires étrangères de 1679 jusqu'à sa mort en 1696. Le fils homonyme du Grand Colbert, Jean-Baptiste Colbert de Seignelay obtient la survivance de la charge paternelle de Secrétaire d'Etat à la Maison du roi, de Paris, du clergé et de la marine, et il exerce cette fonction de 1683 jusqu'à sa mort prématurée en 1690. De la même façon, Jean-Baptiste Colbert de Torcy, fils de Croissy (et donc neveu du Grand Colbert) succède à son père aux Affaires étrangères de 1696 à son retrait en 1715, l'année de la mort de Louis XIV. Un fils cadet du Grand Colbert devient archevêque de Rouen. Charles Colbert du Terron, cousin germain du Contrôleur général, est intendant et supervise directement la construction du port de Rochefort. La fortune de la famille est établie pour des générations, même si aucun Colbert n'occupera plus une place aussi importante que celle de Jean-Baptiste auprès de Louis XIV. Le Roi-soleil a tendance à élever les fils à la fonction de leurs pères, pour des raisons de continuité: Seignelay est formé aux affaires par son père, comme d'ailleurs Louvois. A noter que si l'ascension des Colbert commence avec l'appui des Le Tellier, les deux familles en viennent à nourrir une sourde rivalité.

 

Colbert, l'esclavage et le Code Noir   

Abordons à présent la question essentielle, celle qui obnubile les gens cultivés et instruits que sont les antiracistes, les militants décoloniaux, les apôtres de la déconstruction du roman national honni: le fameux, l'indicible, l'effroyable, l'impardonnable Code Noir. Un philosophe a écrit qu'il s'agit du "texte juridique le plus monstrueux qu'aient produit les Temps modernes". Diantre! Joël Cornette (voir bibliographie) note que le Code "inscrivait le servage dans le droit: l'esclavage était pris en charge, juridiquement authentifié par l'Etat moderne [...]". Fichtre! Peut-être faut-il rappeler quelques vérités: au XVII° siècle, de la Chine à l'Afrique subsaharienne, l'esclavage est répandu, toléré et accepté par quasiment toutes les sociétés humaines. J'aimerais par conséquent, puisqu'il est de bon ton de rompre avec une vision "européocentrée" de l'histoire, qu'on me fournisse les "Codes Noirs" ou équivalents du monde arabo-musulman, de l'Empire ottoman, des principautés mongoles d'Asie centrale, d'Inde ou de l'empire chinois. Quel historien peut produire des législations sur l'esclavage plus généreuses, plus humanistes, que celle de Colbert à la même époque? Aucun, bien entendu. Rappelons d'abord la chronologie: Colbert a bel et bien élaboré le Code Noir mais ce n'est pas lui qui y a apporté la dernière main. Le Code est entré en vigueur en 1685, soit deux ans après la mort de Colbert. Le Code Noir, en effet, reconnaît juridiquement l'esclavage. Pouvait-il en être autrement? Evidemment non: à cette époque, l'économie de plantation est en plein essor et le commerce triangulaire bat son plein. C'est peut-être triste, mais c'est ainsi. Espagnols, Portugais, Anglais font venir des esclaves noirs dans leurs colonies. Avec ou sans le Code Noir, l'esclavage et la traite sont des réalités. Les planteurs français n'ont d'ailleurs pas attendu Colbert et son Code pour exploiter des esclaves africains. Alors qu'aurait-il fallu faire? En admettant même que Colbert ait eu la volonté d'abolir l'esclavage, les planteurs blancs des Antilles françaises se seraient empressés de passer sous pavillon anglais ou espagnol (on verra ce genre de velléités lors de la première abolition de 1794). Le développement économique de Bordeaux et de Nantes aurait été sérieusement freiné. Maintenant, penchons-nous sur le contenu du Code Noir, que les antiracistes et leurs amis ont oublié de lire. En effet, le texte établit que l'esclave est un bien, vendable et achetable. Mais Colbert se préoccupe aussi de la christianisation des esclaves, preuve qu'ils sont considérés comme des êtres humains, puisqu'on ne baptise pas le bétail jusqu'à preuve du contraire. Il ne s'agit pas de dire que le statut servile est digne ou enviable, bien sûr. Il faut cependant rappeler que le Code Noir limite quand même le pouvoir des maîtres, en interdisant par exemple la torture ou la mutilation. Le maître doit nourrir correctement son esclave, l'habiller décemment. Les esclaves ont le droit de se marier avec l'accord du maître, et le mari, la femme et les enfants ne doivent pas être séparés. Plus surprenant, le mariage entre libre et esclave est autorisé, et sachant que les libres sont généralement blancs et les esclaves toujours noirs, cela relativise l'accusation de "racisme" portée par certains ignares contre Colbert. Enfin, l'affranchissement est possible, et l'affranchi est considéré comme un sujet de plein droit du roi de France, indépendamment de sa couleur de peau. Je le répète, je souhaiterais qu'on me prouve qu'à la même époque, la législation ottomane, perse, mongole, indienne ou chinoise sur l'esclavage était plus douce. Les planteurs, eux, ne s'y sont pas trompés: le Code Noir a été mal appliqué, surtout dans ses dispositions les plus favorables aux esclaves. Le texte est même modifié ultérieurement dans un sens plus restrictif: par exemple, les mariages entre blancs et noirs sont interdits, et les affranchissements rendus plus difficiles. En fait, Colbert a bel et bien essayé, sinon d'adoucir, du moins d'humaniser la condition des esclaves noirs.

 

Au terme de cet article, je pense avoir montré que Colbert a bien mérité de la France. Il a droit à une place de choix dans la galerie des grands serviteurs de l'Etat. Vouloir, comme certains, débaptiser les rues ou les établissements portant son nom est un crime, une trahison, un reniement. Et entendre un homme qui fut sans doute l'un des plus mauvais premiers ministres s'en prendre à la mémoire d'un illustre devancier, bien plus compétent et plus efficace, c'est une honte et une ignominie. Qu'on se le dise.

 

(1) Cette mention peut paraître étrange, presque choquante, j'en conviens. Elle m'aurait semblé déplacée il y a quelques années. Mais voilà: nous sommes en 2020, et il est désormais normal de classer les gens en fonction de leur appartenance ethnique. Dont acte.  

 

(2) Là, en revanche, je le mentionne car nombre de ministres importants sont d'origine étrangère: pour le XVII° siècle, on peut mentionner deux prédécesseurs de Colbert, deux Italiens, Concini et Mazarin.

 

Bibliographie:

Bély Lucien (sous la direction de), Dictionnaire de l'Ancien Régime, Quadrige/PUF, 1996

J'ai utilisé l'article, clair et concis, rédigé par Philippe Haudrère sur le Code Noir aux pages 274-275.

 

Cornette Joël, Absolutisme et Lumières 1652-1783 dans la collection "Carré Histoire", Hachette, 2000

Il s'agit d'un manuel basique qui appartient à une série consacrée à l'histoire de France, à destination des étudiants en histoire... ce qui était mon cas lorsque j'ai acquis cet ouvrage, clair et synthétique. L'auteur, professeur à Paris VIII, est un spécialiste reconnu du XVII° siècle français.

 

Petitfils Jean-Christian, Louis XIV, Perrin (collection Tempus), 2008 (1995 pour la 1ère édition)

L'auteur n'est pas un universitaire, mais sa biographie du Roi-soleil a bonne réputation et a été récompensée par l'Académie française; le chapitre X (p.248) est consacré aux années Colbert.

 

Vergé-Franceschi Michel, Chronique maritime de la France d'Ancien Régime, SEDES, 1998

Cet ouvrage détaille chronologiquement l'histoire maritime de la France de 1492 à 1792; il suffit de se reporter aux années du ministère Colbert (1661-1683) pour avoir un aperçu de la politique menée par le Secrétaire d'Etat à la marine.

 

 



17/07/2020
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