Nationaliste Social et Ethniciste

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Et la France fit la guerre en Algérie

Non seulement les enseignants ont beaucoup de temps, mais en plus ils ont les vacances! Pourquoi ne pas profiter de ces congés (bien mérités quoi qu'en pense les envieux) pour enrichir sa culture cinématographique? Voilà plusieurs semaines que j'avais acheté L'ennemi intime de Florent-Emilio Siri. Mais je dois dire que la motivation me faisait défaut. La guerre d'Algérie n'est pas trop mon truc. Enfin, hier soir, je mis le DVD dans le lecteur, sans grande conviction pourtant.

 

Heureuse surprise! Le film s'est révélé intéressant, subtil et somme toute assez juste, ce qui n'est pas facile sur un sujet de ce type, si prompt à tous les déchaînements passionnels et si propice aux déformations en vue de glorifier ou de traîner dans la boue tel ou tel camp. Or ce film a échappé à ce travers et c'est là déjà un bon point. Mais il a d'autres qualités qui méritent d'être soulignées.

 

Rappelons la trame: 1959, dans les âpres paysages montagneux de Kabylie, l'armée française a installé un camp et s'efforce de lutter contre les fellaghas qui mènent des actions de guérilla. Un jeune lieutenant, Terrien (Benoît Magimel), vient prendre la succession d'un officier mort au combat. Il est secondé par le sergent Dougnac (Albert Dupontel), militaire de carrière, vétéran d'Indochine couvert de médailles. Le film permet de suivre une unité française mixte (conscrits français et harkis) dans sa traque et dans ses combats contre les membres du FLN, véritable "ennemi invisible", insaisissable et expert en embuscade meurtrière.

 

Le film a déjà ce mérite de rappeler que la guerre d'Algérie fut une guerre d'appelés, et précise à la fin que 27 000 soldats français y ont laissé la vie. Peu importe ce que l'on pense par ailleurs de cette guerre, il faut se souvenir que c'est au nom de la France qu'elle a été livrée. Par conséquent, il faut l'assumer: ce n'est pas une "autre France", ce ne sont pas les "fascistes" qui ont mené la guerre, mais la République française. Nous devons en tant que citoyens français honorer la mémoire de ces jeunes soldats tombés au combat.

 

D'autre part, le film rappelle les sympathiques méthodes du FLN: instauration d'un climat de terreur dans les villages, exactions, massacres "pour l'exemple" le cas échéant. Et je ne parle pas des soldats français torturés, égorgés, avec les parties génitales coupées et placées dans la bouche. En face, l'armée française, qui répond à la sauvagerie par la sauvagerie. En cela, le film est bien fait: il montre qu'il n'y a pas d'un côté les bons et de l'autre les méchants, mais des êtres humains qui, dans chaque camp, sont pris dans l'engrenage de la haine et de la violence. Alors les Français torturent, massacrent, exécutent. La justification est toujours la même: ce qu'a fait l'Autre, le Barbare. A Terrien, qui conteste au début ces méthodes, un capitaine des renseignements lui répond en lui montrant les photos de colons et de soldats français tués et mutilés. "Quand j'ai des doutes, je les regarde" lance cet homme qui se présente comme un ancien maquisard torturé par la Gestapo. Le film nous rappelle ainsi qu'en histoire rien n'est jamais simple et fait bien apparaître la complexité du conflit.

 

Comment un homme respectable, civilisé, policé devient-il tortionnaire? Par quel stupéfiant mécanisme abdique-t-il son humanité pour se livrer sans retenue à la cruauté sadique? Ces questions, le réalisateur du film se les est certainement posé. Et il y apporte une réponse intelligente. Plongé dans l'horreur de la guerre, Terrien voit ses repères moraux se brouiller progressivement. Il voit ses camarades, des gars de vingt ans, plein de vie, tomber sous la mitraille. Il contemple leurs cadavres mutilés. Et petit à petit, la haine, le désir de vengeance l'emporte sur la voix de la conscience et de la modération. Il est très facile, soixante ans après, confortablement installé dans un fauteuil de s'en prendre avec véhémence à l'armée française, de dénoncer les atteintes aux Droits de l'Homme. Qui n'a pas connu l'insoutenable pression psychologique et l'angoisse du soldat français à cette époque ne saurait juger. Il ne s'agit pas de dire que c'est bien! Mais plutôt que de dénoncer niaisement la torture, le film la contextualise (ça, un historien adore) et évite de trop en faire (tout le film n'est pas centré sur la torture).

 

Une scène tout à fait remarquable se déroule durant une permission de Terrien en France. Se rendant au cinéma, le lieutenant regarde les actualités et peut ainsi voir la vision "officielle" de la guerre: des soldats qui discutent amicalement avec la population et qui aident les villageois! C'est l'image de la guerre moderne, une guerre... pacifique! Aujourd'hui, les reportages sur l'Irak et l'Afghanistan montrent exactement la même chose.

 

Enfin, il est rappelé à la fin du film que 300 000 à 600 000 Algériens sont morts durant la guerre. En effet, la population algérienne a beaucoup souffert du conflit, prise entre deux feux: d'un côté l'armée française, de l'autre les fellaghas. C'est sur cette population civile que s'est bien souvent exercée la cruauté des deux camps. Car, comme le dit Dougnac du village de Taïda, "nous le contrôlons le jour, mais la nuit, ce sont les fell qui en sont maîtres". La guerre d'Algérie est certes une guerre d'indépendance, mais elle s'est doublée d'une véritable guerre civile (y compris entre mouvements indépendantistes). Tous les Algériens ne sont pas morts d'une main française...

 

Je me demande si le film a été projeté en Algérie. Il n'entre pas, en tout cas, dans les schémas historiques de M. Bouteflika, qui tente de fédérer son peuple dans la haine du Français en lui rappelant complaisamment toutes les atrocités commises par l'armée française, et ce pour mieux faire oublier sa propre incurie. Naturellement, les crimes du FLN sont étrangement tus. Il est évidemment dérangeant pour le pouvoir algérien de dire que non seulement tous les Algériens n'ont pas soutenu le FLN, mais qu'en plus certains se sont rangés du côté français...



25/04/2009
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